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De l’échange équivalent en entreprise (comme dans FullMetal Alchemist)

L’humanité ne peut rien obtenir sans donner quelque chose en retour. Pour chaque chose reçue, il faut en abandonner une autre de même valeur.

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Le principe de l'échange équivalent en entreprise

Dans notre société, nous sommes conditionnés à vouloir un travail à tout prix. C’est la 1ère question que l’on pose lorsqu’on rencontre quelqu’un (quand on rencontrait des gens avant). « Qu’est-ce que tu fais dans la vie ? ». Comme si c’était quelque chose qui nous définit intrinsèquement. Pour exister socialement, nous devons avoir une activité. Pour avoir des droits, nous devons travailler. Juste pour exister. Cela nous conduit à être prêt à abandonner (nos principes, notre individualité) dans l’espoir d’obtenir ce laissez-passer, d’obtenir quelque chose de plus important. Et souvent, laisser la vie professionnelle prendre le dessus sur le reste. Sans attendre d’en recevoir quoique ce soit en retour (comme une sorte d’échange équivalent).

Après avoir été licenciée pour raisons économiques de mon premier vrai « travail » (lisez CDI dans ma branche d’études) en 2016, je suis restée plus d’une année sans travail. À chercher qui j’étais une fois détachée d’une activité pour me définir. Pendant cette année, je suis surtout devenue de plus en plus désespérée de (re)trouver un travail. Je voulais me sentir à nouveau part de la société au lieu d’en profiter.

Le formatage et le pré formatage

Lorsque l’on prend ses fonctions dans une nouvelle entreprise, il faut faire bonne impression et montrer qu’on en veut. Il faut tout faire pour valider cette fameuse période d’essai et garder sa place (avoir une mutuelle, aussi). Cela commence même dès le premier entretien d’embauche. Lorsqu’il s’agit d’anticiper les questions et de réfléchir à des réponses adaptées au poste. Lorsqu’on cherche à entrer dans le moule préétabli. Comment changer de forme pour être le candidat parfait ? Si bien qu’on en vient à oublier que le travail n’est pas une transaction à sens unique. S’il doit être profitable à l’entreprise, le travail ne doit, cependant, pas enfermer le salarié dans une bulle dorée. Il doit le nourrir, le faire évoluer et même, lui permettre de se développer.

Si l’on pouvait encore entretenir quelques illusions, la période Covid a montré que le travail ne pouvait pas se contenter d’être simplement des tâches effectuées seulement pour le salaire mensuel. Il fallait leur donner du sens.

La limite du « Tout pour l’entreprise »

Crédit photo : Nick Fewings – Unsplash

Lors de mes premiers jours/mois dans une société, lorsque je posais des questions, j’ai souvent entendu qu’il fallait le faire pour le bien de l’entreprise. Tellement de fois que c’est devenu intégral dans ma façon d’aborder les situations. Comme par exemple, ce n’était pas particulièrement la manière dont j’aurais réglé la situation mais pour le bien de l’entreprise, j’allais garder le silence.

Je n’avais pas envie de faire ça mais pour le bien de l’entreprise, j’allais m’y attaquer. Mes idées/mon travail étaient attribués à d’autres personnes mais il fallait que je m’y fasse parce que c’était pour le bien de l’entreprise. Je voyais et vivais des choses qui allaient à l’encontre de mes valeurs, mais, pour le bien de l’entreprise, je devais garder le silence.

Si cette attitude permet de faire carrière sans trop de vagues, il reste que cela réduit l’employé à une pensée unique où il n’est considéré que comme un pion sans marge de manœuvre. Cela réduit le temps de travail à un simple flux monétaire. Je fais ce qu’on me dit de faire en échange d’un salaire fixe tous les mois.

Et il n’y a rien de mal dans cette philosophie mais lorsque l’on veut exister professionnellement, cette approche nous (me) rend beaucoup trop vulnérables. Cela nous formate et nous enlève notre liberté de pensée, notre particularité et même notre fougue.

Si vous vous contentez de me dicter ce que je dois faire, si je dois suivre une simple liste de tâches sans penser, sans être nourrie, je passe en mode veille et je rouille. Je perds mon assurance.   

Partir à la recherche de l’échange équivalent en entreprise

Face à la pression sociale actuelle, il est difficile de poser des limites. Personnellement, j’ai commencé à me poser des questions lorsque je me suis rendue compte qu’après plus qu’un an à assumer 2 postes, j’étais bloquée dans une voie sans issue. Qu’est-ce que j’allais devenir maintenant que je ressemblais de plus en plus à ma société et de moins en moins à moi ?

Je ne suis pas le genre de personne qui peut rester assise toute la journée, à attendre que le temps passe, à faire des choses en mode exécutrice, simplement satisfaite à l’idée d’avoir une paie à la fin du mois. Il n’y avait qu’une seule solution : partir à la recherche du fameux échange équivalent ailleurs. Si la situation ne me convenait plus, il ne me restait plus qu’à tenter ma chance ailleurs.

Dire au revoir : lâcher prise et faire son deuil

Lorsque j’ai commencé à écrire cet article, la formation de Product Owner promise m’avait été refusée parce qu’elle n’était pas dans la trajectoire de la société. Surprise, je m’étais demandée pourquoi mon évolution professionnelle n’était pas dans la trajectoire de l’entreprise. Pourquoi, après avoir passé un an et demi à gérer le développement d’une solution viable simplement au talent et à la sueur de mon front, je ne méritais pas de voir mon travail officiellement reconnu ?

J’ai commencé à écrire cet article car c’était un moyen d’exorciser cette incompréhension, cette peine et ce sentiment de trahison. De discuter de l’utopie de l’échange équivalent dans le domaine professionnel mais aussi de rationaliser la décision de partir.

Il y a presque 4 ans, alors que je me désespérais de retrouver un emploi après ma période de chômage, cette société m’a fait confiance et m’a donné des opportunités inespérées. Je m’étais sans doute investie à l’excès parce que je croyais au produit et cela, encore plus, quand le produit est devenu mon protégé. Mais je n’étais qu’un pion. Un pion dangereux parce qu’il voulait atteindre le bout de l’échiquier pour devenir quelque chose d’autre.

Partir à la recherche de l'échange équivalent en entreprise : une entreprise
Crédit photo : Marek Kizer – Unsplash

Alors partir, c’est la décision qu’il fallait prendre mais partir, ça fait peur. Changer de terrain de jeu. Recommencer. Avoir la patience de ne pas savoir. Prendre son temps et apprendre. Repartir à zéro. Découvrir un nouveau stress. Commencer un nouveau combat. Je suis terrorisée mais c’était le coup qu’il fallait que je joue. C’était le voyage qu’il fallait que j’entreprenne pour retrouver mon corps, au nom de l’échange équivalent.

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